DES VICTIMES DE HARCÈLEMENT SEXUEL IGNORÉES ET DES AGRESSEURS PROTÉGÉS : ÇA SUFFIT !

C’est une « histoire » comme il en existe tant d’autres et qui met en lumière les failles d’un système qui, inlassablement, protège les agresseurs sexuels.

À Sciences Po Bordeaux, M. H, directeur de recherche au CNRS, est connu depuis des années pour se masturber dans la bibliothèque en regardant fixement les décolletés des étudiantes. Tout le monde sait, personnels comme étudiant.e.s. Personne ne fait rien. Et pour cause, quand certain.e.s réagissent, la seule conséquence est leur stigmatisation.

Une première fois pourtant, en 2006, des étudiantes étrangères se plaignent de ces agissements. De manière tout à fait informelle, une « sanction » est prise : M. H est interdit d’accès à la bibliothèque pendant un an. Rien d’autre. Puis en 2012, une enseignante victime de ces agissements signale les faits sur le registre du CHSCT (Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Une agente de prévention recueille des témoignages et le sujet est discuté en réunion du CHSCT. Ce dernier établit la véracité des faits et décide une nouvelle fois d’interdire à l’agresseur d’accéder à la bibliothèque pendant un an… Le directeur de l’établissement, averti par le CHSCT, ne fait rien. La Délégation régionale du CNRS, avertie notamment par le directeur du laboratoire, ne fait rien. Le ministère, averti notamment par un collectif militant bordelais, ne fait rien.

Puisque personne ne fait rien, M. H obtient sans embûche l’éméritat début 2013. Directeur de recherche émérite, il continue ainsi à diriger des thèses. En septembre 2014, il prend même des responsabilités dans la direction de l’IDEX de l’Université de Bordeaux. Un syndicat alerte les membres du CA de l’Université. Aucune réponse.

CLASCHES sollicite alors, en novembre 2014, la direction nationale du CNRS. Pour réponse, CLASCHES a d’abord reçu une leçon procédurale toute paternaliste d’un dirigeant du CNRS à l’occasion de la « première journée de sensibilisation sur le harcèlement sexuel »… au CNRS !

Et oui, les responsables de l’impunité seraient les victimes et CLASCHES qui ne suivraient pas les procédures ! Mais de quelles procédures parle-t-on ?

  • De celles qui veulent que la direction nationale du CNRS agisse après que la Délégation régionale ait réalisé une enquête et attesté la véracité des faits dénoncés, alors même que cette Délégation a simplement refusé d’enquêter.
  • De celles qui exigent que les victimes connaissent le statut administratif de leur agresseur et comprennent l’invraisemblable imbroglio réglementaire et administratif pour savoir à qui et comment demander (quémander serait plus juste…) des sanctions.
  • De celles qui garantissent la protection des agresseurs en assurant l’entre-soi des accusés et des personnes chargées d’instruire les dossiers.
  • De celles qui permettent que, en dépit des faits rapportés notamment à la Délégation régionale du CNRS, le dossier de M. H ne mentionne pas les faits dénoncés.
  • De celles qui, au final, laissent les victimes seules et sans réponse.

Le CNRS s’était néanmoins engagé, en décembre 2014, à prendre en charge ce « dossier ». Aujourd’hui, rien ne nous indique pourtant que des investigations soient en cours, encore moins qu’une décision s’apprête à être prise…

Face à la gravité des faits et à l’accumulation des preuves et témoignages, CLASCHES demande que le CNRS retire l’éméritat de cette personne.

Mais CLASCHES souhaite alerter les pouvoirs publics sur ce que révèle cette « affaire » : les procédures disciplinaires sont inefficaces et protègent les auteurs de harcèlement sexuel et de violences sexuelles ! Même quand des victimes osent parler, même quand des personnels soutiennent les victimes et signalent les faits, rien ne se passe ! Ceci ne peut que contribuer à maintenir le tabou qui pèse sur le harcèlement sexuel dans l’enseignement supérieur et qui continue d’empêcher la mise à jour de nombreux faits similaires.

À l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre dernier, la ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche a affirmé son souhait de lutter contre les violences sexistes et sexuelles. Elle doit alors entendre le message que CLASCHES porte depuis plus de 10 ans : cet objectif ne pourra pas être atteint sans une réforme profonde des procédures disciplinaires ! L’exemple rapporté ne fait que douloureusement le prouver.


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