Harcèlement sexuel : quelle protection dans l’Enseignement Supérieur et la Recherche ?

En préparation du 25 novembre, journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, Christiane TAUBIRA, ministre de la Justice et Najat VALLAUD-BELKACEM, ministre des Droits des Femmes, ont lancé le 12 novembre une campagne gouvernementale d’information et de sensibilisation au problème du harcèlement sexuel. Cette campagne a été intitulée : « Harcèlement sexuel : désormais, la loi vous protège », et vise en particulier « le monde professionnel et les milieux associatifs ou sportifs ».

Et si cette loi protège effectivement les salarié·e·s du privé et les agent·e·s de la fonction publique, en revanche, elle laisse sur la touche les milliers d’« usagers » et d’« usagères » de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (ESR), dont la protection, justement, dépend du simple article L.712-2 du Code de l’éducation. Article qui ne s’applique d’ailleurs qu’aux universités, non aux unités de formation médicale ou agricole, instituts, grandes écoles et grands établissements, dont le fonctionnement est réglé par décret.
Par ailleurs, la campagne gouvernementale fait l’impasse sur des informations précieuses concernant les recours possibles pour les victimes. Le Code pénal et le Code du travail sont en effet modifiés par la loi du 6 août 2012, mais rien ne concerne la discipline qui s’applique à la fois aux agent·e·s de la fonction publique et aux « usagers » de l’ESR, et dont le fonctionnement pose de nombreux problèmes.

La protection des personnels et « usagers » de l’ESR n’est pas qu’une histoire de loi : c’est une affaire de décrets, d’arrêtés, de circulaires et de notes ministérielles. Pourtant, les amendements qui avaient été déposés en ce sens lors des discussions du projet de loi en juillet ont été rejetées, au motif que les réformes demandées relevaient du réglementaire, non du législatif.
Les procédures pénales sont longues, coûteuses, et elles ne permettent pas de faire reconnaître le harcèlement sexuel dans l’enseignement supérieur et la recherche. Or, ni les personnels (dans le public) ni les « usagers » ne peuvent recourir au Code du travail ou aux Prud’hommes. Leur alternative est le recours administratif interne, la section disciplinaire, dont le fonctionnement actuel ne peut leur rendre justice.

Le CLASCHES avait activement participé à la concertation entre les deux ministres, les commissions des lois et les associations féministes. En dépit du rejet de ces amendements, Najat VALLAUD-BELKACEM, ministre des Droits des Femmes et Geneviève FIORASO, ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, s’étaient engagées à décliner cette campagne nationale dans le milieu de l’ESR et à travailler sur une réforme de la section disciplinaire. Un groupe de travail a effectivement été constitué avec le MESR et le CLASCHES. Nous en attendions les réformes nécessaires, le lancement d’une campagne de sensibilisation et de formation des personnels compétents. Les deux derniers points ont bien été amorcés, mais nos demandes de réformes réglementaires ont été refusées.

Une campagne d’information, de sensibilisation et de formation spécifique à l’ESR serait déjà un grand pas. Mais seule une réforme de la discipline pourra donner tout son sens à ce qu’affirme si résolument la campagne gouvernementale : « Désormais, la loi vous protège ».


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